Accueil > Littérature > Anthologie > H > HUGO Victor (1802-1885) > Clair de lune
- La lune était sereine et jouait sur les flots. -
- La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise,
- La sultane regarde, et la mer qui se brise,
- Là-bas, d’un flot d’argent brode les noirs îlots.
- De ses doigts en vibrant s’échappe la guitare.
- Elle écoute... Un bruit sourd frappe les sourds échos.
- Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos,
- Battant l’archipel grec de sa rame tartare ?
- Sont-ce des cormorans qui plongent tour à tour,
- Et coupent l’eau, qui roule en perles sur leur aile ?
- Est-ce un djinn qui là-haut siffle d’une voix grêle,
- Et jette dans la mer les créneaux de la tour ?
- Qui trouble ainsi les flots près du sérail des femmes ? -
- Ni le noir cormoran, sur la vague bercé,
- Ni les pierres du mur, ni le bruit cadencé
- Du lourd vaisseau, rampant sur l’onde avec des rames.
- Ce sont des sacs pesants, d’où partent des sanglots.
- On verrait, en sondant la mer qui les promène,
- Se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine... -
- La lune était sereine et jouait sur les flots.
Victor HUGO (1802-1885)