- Le mai le joli mai en barque sur le Rhin
- Des dames regardaient du haut de la montagne
- Vous êtes si jolies mais la barque s’éloigne
- Qui donc a fait pleurer les saules riverains ?
- Or des vergers fleuris se figeaient en arrière
- Les pétales tombés des cerisiers de mai
- Sont les ongles de celle que j’ai tant aimée
- Les pétales fleuris sont comme ses paupières
- Sur le chemin du bord du fleuve lentement
- Un ours un singe un chien menés par des tziganes
- Suivaient une roulotte traînée par un âne
- Tandis que s’éloignait dans les vignes rhénanes
- Sur un fifre lointain un air de régiment
- Le mai le joli mai a paré les ruines
- De lierre de vigne vierge et de rosiers
- Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers
- Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes
Guillaume Apollinaire (1880-1918), Alcools, 1913