- Je ne sais pourquoi
- Mon esprit amer
- D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
- Tout ce qui m’est cher,
- D’une aile d’effroi
- Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?
- Mouette à l’essor mélancolique,
- Elle suit la vague, ma pensée,
- À tous les vents du ciel balancée,
- Et biaisant quand la marée oblique,
- Mouette à l’essor mélancolique.
- Ivre de soleil
- Et de liberté,
- Un instinct la guide à travers cette immensité.
- La brise d’été
- Sur le flot vermeil
- Doucement la porte en un tiède demi-sommeil.
- Parfois si tristement elle crie
- Qu’elle alarme au loin le pilote,
- Puis au gré du vent se livre et flotte
- Et plonge, et l’aile toute meurtrie
- Revole, et puis si tristement crie !
- Je ne sais pourquoi
- Mon esprit amer
- D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
- Tout ce qui m’est cher,
- D’une aile d’effroi
- Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?
Paul VERLAINE (1844-1896)