Accueil > Littérature > Anthologie > B > BAUDELAIRE Charles (1821-1867) > L’invitation au voyage
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on enfant, ma soeur,
- Songe à la douceur
- D’aller là-bas vivre ensemble !
- Aimer à loisir,
- Aimer et mourir
- Au pays qui te ressemble !
- Les soleils mouillés
- De ces ciels brouillés
- Pour mon esprit ont les charmes
- Si mystérieux
- De tes traîtres yeux,
- Brillant à travers leurs larmes.
- Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
- Luxe, calme et volupté.
- Des meubles luisants,
- Polis par les ans,
- Décoreraient notre chambre ;
- Les plus rares fleurs
- Mêlant leurs odeurs
- Aux vagues senteurs de l’ambre,
- Les riches plafonds,
- Les miroirs profonds,
- La splendeur orientale,
- Tout y parlerait
- À l’âme en secret
- Sa douce langue natale.
- Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
- Luxe, calme et volupté.
- Vois sur ces canaux
- Dormir ces vaisseaux
- Dont l’humeur est vagabonde ;
- C’est pour assouvir
- Ton moindre désir
- Qu’ils viennent du bout du monde.
- - Les soleils couchants
- Revêtent les champs,
- Les canaux, la ville entière,
- D’hyacinthe et d’or ;
- Le monde s’endort
- Dans une chaude lumière.
- Là, tout n’est qu’ordre et beauté,
- Luxe, calme et volupté.
- Charles BAUDELAIRE (1821-1867)
- Les fleurs du mal
- Van Eyck, Les époux Arnolfini, 1434