- Je jette avec grâce mon feutre,
- Je fais lentement l’abandon
- Du grand manteau qui me calfeutre,
- Et je tire mon espadon ;
- Élégant comme Céladon,
- Agile comme Scaramouche,
- Je vous préviens, cher Myrmidon,
- Qu’à la fin de l’envoi je touche !
- Vous auriez bien dû rester neutre ;
- Où vais-je vous larder, dindon ?...
- Dans le flanc, sous votre maheutre ?...
- Au cœur, sous votre bleu cordon ?...
- - Les coquilles tintent, ding-don !
- Ma pointe voltige : une mouche !
- Décidément… c’est au bedon,
- Qu’à la fin de l’envoi je touche.
- Il me manque une rime en eutre…
- Vous rompez, plus blanc qu’amidon ?
- C’est pour me fournir le mot pleutre !
- - Tac ! je pare la pointe dont
- Vous espériez me faire don ; -
- J’ouvre la ligne, - je la bouche…
- Tiens bien ta broche, Laridon !
- À la fin de l’envoi je touche.
- Prince, demande à Dieu pardon !
- Je quarte du pied, j’escarmouche,
- Je coupe, je feinte… Hé ! là donc,
- À la fin de l’envoi je touche.
Edmond Rostand (1868-1918), Cyrano de Bergerac, I, 4