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Complainte amoureuse

samedi 24 mars 2018, par Silvestre Baudrillart

  • Oui dès l’instant que je vous vis
  • Beauté féroce, vous me plûtes !
  • De l’amour qu’en vos yeux je pris,
  • Sur-le-champ vous vous aperçûtes.
  • Mais de quel air froid vous reçûtes
  • Tous les soins que pour vous je pris !
  • Combien de soupirs je rendis !
  • De quelle cruauté vous fûtes !
  • Et quel profond dédain vous eûtes
  • Pour les vœux que je vous offris !
  • En vain, je priai, je gémis,
  • Dans votre dureté vous sûtes
  • Mépriser tout ce que je fis ;
  • Même un jour je vous écrivis
  • Un billet tendre que vous lûtes
  • Et je ne sais comment vous pûtes,
  • De sang-froid voir ce que je mis.
  • Ah ! Fallait-il que je vous visse !
  • Fallait-il que vous me plussiez,
  • Qu’ingénument je vous le disse,
  • Qu’avec orgueil vous vous tussiez !
  • Fallait-il que je vous aimasse,
  • Que vous me désespérassiez,
  • Et qu’enfin je m’opiniâtrasse
  • Et que je vous idolâtrasse
  • Pour que vous m’assassinassiez !

Alphonse ALLAIS (1854-1905)

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